A cœur ouvert : J’ai frôlé la dépression

21 août 2019

A cœur ouvert : J’ai frôlé la dépression

En me lançant dans le blogging, je ne m’imaginais jamais parler de moi dans un billet parce que j’ai toujours appris à confier mes secrets à mon journal intime. Le seul témoin de mes moments de doutes, de mes peurs…bref, le gardien de mes secrets les plus enfouis. Ceux qui me connaissent bien savent que j’évite d’aborder des sujets trop personnels ou de parler de moi. Un ami m’a dit un jour ceci : « qu’écrire sur soi c’est se donner en offrande aux dessins des immondes ». D’ailleurs, je me suis toujours demandé comment les autres faisaient pour aborder des sujets personnels sans gêne, raconter leurs vécus et surtout les partager. Mais à mon tour, aujourd’hui, j’ai décidé de me jeter à l’eau et peut-être…en pâture.

Dans ce billet, je m’apprête à me dévoiler, à parler de comment j’ai combattu la dépression…L’idée de la publication du contenu de ce billet ne m’a jamais traversé l’esprit. Du moins, jusqu’à un récent échange que j’ai eu avec une amie qui se bat contre la dépression. Elle affronte cette dernière, depuis des mois et a même failli, me dit-elle, s’ouvrir les veines. Heureusement, son mari est intervenu à temps pour l’en empêcher. Mais avant d’en arriver à cet extrême, elle avait lancé un SOS auprès de sa famille. Mais personne n’a prêté attention à son appel de détresse. D’aucuns l’ont même traitée d’écervelée. D’autres l’ont mise en garde contre les risques pour elle de gâcher la chance et le bonheur (boulot, enfant, mari) qui sont les siens. Je ne jetterai pas l’opprobre sur cette famille. Généralement, sous nos cieux, il en est ainsi. Les plaintes relatives à la dépression sont assimilées à de simples caprices, sinon à une inacceptable absurdité. En somme, la dépression passe pour une « histoire de Blancs ». Pourtant, une écoute en apparence banale peut éviter des drames. Comme celui qui se serait produit si mon amie s’était effectivement suicidée. Soit !

Ceci dit, sa situation à elle m’a fait pousser des ailes et m’a convaincue de la nécessité d’en parler. Contrairement à elle, je n’ai parlé de ma dépression à personne jusqu’à aujourd’hui. Je l’ai dit à l’entame de ce billet, je ne sais pas extérioriser ce que je ressens. C’est mon plus grand défaut d’ailleurs. Je ne sais pas me confier. Je ne sais pas m’ouvrir aux autres. Je préfère affronter seule mes problèmes, combattre mes démons et braver les obstacles qui se dressent sur mon chemin…Mes parents et mes ami (es) m’ont toujours fait le reproche. J’ai cette capacité à dissimuler mes chagrins et peines dans un sourire sans éveiller le moindre soupçon, même pour la personne la plus attentionnée au monde.

Alors si aujourd’hui, j’ai décidé de parler ouvertement de mon combat contre la dépression, c’est bien parce que quelque part, j’espère que ceci peut aider tous ces gens qui traversent la même situation en silence. Bien sûr, chaque cas est diffèrent et chacun vit et combat la sienne de façon unique.

Nous sommes en 2017, je venais de passer les 8 premiers mois de l’année sans anicroche. Tout était normal dans ma vie, je baignais dans un pur bonheur. J’étais fière de moi et de ce que j’accomplissais jusqu’à cet après-midi du mois de septembre, où tout a basculé. Au début, j’ai pensé à une mauvaise humeur passagère. Mais il n’en était rien.

Vous savez que vous vous sentez mal, que quelque chose vous tourmente et vous brise au plus profond de votre être. Mais vous n’arrivez pas à mettre un nom dessus. Votre esprit farfouille le passé à la recherche d’un détail susceptible d’avoir pu provoquer cela : une trahison, une déception, un coup de massue, une injustice…mais NADA. C’était mon cas à l’époque. Et croyez moi, ceci est deux fois plus pénible à vivre que la dépression elle-même.

Comme tout être humain, il m’arrive souvent de me sentir mal et d’avoir l’envie de tout plaquer. Mais je ne m’étais jamais sentie aussi mal. Le plus terrible cependant, c’était l’impossibilité de trouver une explication rationnelle à cette situation. Ce que j’ai vécu en 2017 n’était comparable à aucune des situations que j’avais traversées par le passé.

Au fil des jours et semaines, je ressentais une certaine angoisse. Mon humeur changeait, je devenais hystérique, une impression de vide s’emparait de moi. Je travaillais sur plusieurs projets importants. Aussi, j’ai mis mon malaise sur le compte du surmenage, des difficultés quotidiennes, des contrariétés, du stress et de la forte pression que je subissais. C’est l’alibi que mon esprit voulait accepter.

Durant des semaines, toutes ces choses enfouies et rejetées ont fini par devenir ingérable et un beau matin ça m’a explosé en pleine face. La détonation était si forte que pendant des semaines, j’ai souffert des crises de panique, d’angoisse et d’insomnie. Toutes ces crises étaient accompagnées de palpitations, migraines et des chutes vertigineuses de ma tension. Étant naturellement hypotendue avec quelques soucis cardiaques, j’ai tout de suite fait le lien et établi mon propre diagnostic. Mais il me fallait aller voir mon cardiologue pour confirmation. Son diagnostic était sans appel : tout ceci n’avait aucun lien avec mon problème cardiaque, mais que c’était plutôt des signes d’un début de dépression et qu’il me fallait en parler à un spécialiste. Entendez par-là, aller voir un psy. Dans ma tête, mon cardiologue avait perdu les boules. Jamais je n’irai parler à un psy, fût-il un génie dans son domaine. En fait, je refusais tout simplement d’accepter que j’étais peut-être dépressive ; d’admettre que cela pouvait m’arriver. Alors, je me suis obstinée à croire que c’était juste une crise passagère, sauf que c’en n’était pas une, et que je me gourais.

Après trois mois, je continuais à sombrer et ma souffrance s’accentuait de plus belle. Elle était d’une cruauté infernale, inouïe. Le rythme de mon sommeil était bouleversé avec des troubles digestifs, ce qui en soi est très dangereux pour quelqu’un d’hypotendu. Malgré toute cette panoplie de sentiments contradictoires, je refusais de voir la réalité en face et de chercher de l’aide. Il a fallu que je fasse une crise qui a duré je ne sais combien d’heures pour me rendre à l’évidence et réaliser que j’avais bel et bien un problème, que j’étais mal en point. Et même après, je me suis obstinée à ne pas en parler. Mon côté têtu opposait un niet catégorique.

Pour échapper à mes démons intérieurs, j’étais devenue 4 fois plus productive. Pour moi, il était inconcevable que je sois peut-être dépressive et ne pas faire quelque chose. Disons que j’avais besoin de m’occuper l’esprit. Sauf que j’enchaînais décision foireuse sur décision foireuse.

Vu de l’extérieur, j’agissais comme si tout allait bien. Aux yeux du monde, j’étais heureuse et épanouie, alors qu’au fond je me noyais.

Le jour, je faisais bonne figure. Même si pendant les heures de travail, il m’arrivait de me cacher dans les toilettes pour ruminer mon mal. Mais je veillais à ce que personne d’autre ne s’en rende compte et j’y ai réussi ! Je refusais de laisser transparaître ma douleur. La nuit, seule dans mon lit à me tordre de douleurs, j’étais en proie à des doutes.

La prière et la méditation m’ont sauvée de la dépression

Cette situation avait trop duré et je ne m’en sortais pas. En parler ? Il n’en était pas question. Que faire alors ? Entre temps, une occasion de voyage s’est présentée et j’ai sauté dessus. Je me suis envolée pour le Sénégal où je suis restée 6 mois. Inconsciemment, j’espérais et priais pour que ce changement d’air me permette d’en finir une bonne fois pour toute avec cette situation. Là aussi, je me méprenais. Lorsqu’on combat la dépression, il ne vous suffit pas de changer d’air, de partir pour qu’elle disparaisse comme par enchantement. Non, elle vous suivra comme votre ombre jusqu’à ce que vous décidiez de l’affronter. Alors, j’ai continué à broyer du noir, encore et encore.

J’avais longtemps joué à l’autruche en feignant d’aller bien ; il était grand temps que j’y mette un terme. C’est comme ça qu’un beau matin, j’ai décidé de faire de la méditation matinale et des prières surérogatoires la nuit.

Tous les jours, pendant des heures, j’avais un tête-à-tête avec mon MOI intérieur. Au début, je ne vous cache pas que c’était ardu pour moi de refouler les pensées négatives qui asticotaient mon esprit. Mais je m’efforçais à ne me concentrer que sur celles qui me procurent du pur bonheur. Pendant mes heures de prières, il m’arrivait de verser des torrents de larmes.

Aujourd’hui encore, j’ignore totalement l’élément déclencheur de ma dépression. Mais une chose est certaine : j’ai réussi à la vaincre. Et grâce à cette épreuve, je « réapprend» à vivre, à faire passer mon bonheur avant celui des autres, à me reconstruire, à m’écouter, à combler mes moindres désirs, à me réaliser, à jouir pleinement de chaque instant et à me recentrer sur moi.

S’il y a une leçon à tirer de cette épreuve, c’est que pour vaincre la dépression, il faut accepter et admettre qu’on en souffre. Ensuite, en parler. Sur ce point, ne pas suivre mon exemple. Parlez-en, cherchez de l’aide et du soutien. Au mieux vous aurez des conseils avisés et du soutien ; au pire, vous continuerez à sombre. Mais dans les deux cas, parlez-en. Je n’en ai certes pas fait à l’époque. Mais je touche du bois, s’il m’arrivait de revivre la même situation, j’en parlerais.

En écrivant ces lignes, j’ai revécu chaque instant de ces moments. C’était à la fois douloureux, libérateur et apaisant. Ne dit-on pas que l’écriture est une thérapie ?

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